par karatejapon » Mer Oct 24, 2012 5:45 pm
Nous avons suivi, vendredi dernier, le kuro obi kenkyukai (cours réservé aux pratiquants portant la ceinture noire), dispensé par Artur Hovannisyan Sensei et vous en proposons une description.
A notre arrivée au Honbu dôjô nous avions le choix car, à 19:00, débutaient deux cours en parallèle. Celui réservé aux yûdansha donc mais aussi celui dénommé ippan et ouvert à tous. Ce dernier regroupait d'ailleurs des deshi fort divers, de la ceinture blanche au nidan, sous la direction d'un Sensei yondan.
Il faut en effet savoir que certains élèves craignent quelque peu ce fameux cours pour ceintures noires, réputé comme particulièrement dur sur le plan physique mais aussi mental. Le Sensei Arménien et sa forte personnalité font l'unanimité au Honbu dôjô mais peuvent en faire reculer plus d'un.
Votre webmestre, lui, a choisi.
Nous n'étions que huit yûdansha pour cet entraînement dont deux jeunes femmes. Sept shôdan et votre serviteur, Senpai du groupe donc, entament les débats sans tarder.
Dans un premier temps rien que de très classique avec l'échauffement et les étirements habituels des cours du Honbu dôjô.
Par contre, au bout d'une dizaine de minutes, le Sensei se lance dans des séries de pompes et d'abdominaux. Chaque deshi compte jusqu'à dix avec un kiai poussé sur le dernier temps.
Cinquante pompes pour commencer puis cinquante remontées de buste puis c'est reparti pour les pompes et à nouveau les abdominaux. Suivront des séries pour renforcer la zone lombaire.
Voyant les visages déconfits et les airs épuisés, Artur Hovannisyan Sensei, facétieux comme à son habitude, demande ce qui se passe. Il feint de s'étonner et rappelle que tous ici sont yûdansha. Il ne comprend donc pas.
Pour plus de clarté, reprenons ici ses paroles: "Vous avez au moins dix ans de pratique puisque vous portez une ceinture noire. Alors que se passe-t-il...? A vous de vous poser la question. Demandez vous pourquoi vous n'arrivez pas à finir les séries de pompes et d'abdominaux. Ne croyez-vous vous pas que vous vous laissez aller? Posez-vous des questions..."
Après cette forme d'éveil, nous poursuivons avec les exercices de kihon et idogeiko.
Cours pour yûdansha oblige, les enchaînements sont techniquement ardus et puissance, vitesse et kime sont requis.
Là encore, le Sensei marque une pause pour questionner certains d'entre nous sur la conscience de ce qu'ils sont en train de faire, ou son absence.
Laissons à nouveau le Sensei s'exprimer selon ses propres termes: "Réfléchissez...Qu'êtes-vous en train de faire? Voyez vous l'adversaire qui vous fait face? Où frappez vous? Soyez conscients sur chaque technique, même dans les enchaînements. Chaque coup doit être donné dans l'esprit ichigeki, même dans une série de dix.
Matsui Shokei Kanchô nous dit toujours que si vous venez au dôjô pour faire bouger votre corps, autant aller dans un club de sport. Ce sera plus convivial et moins difficile. Tout le monde peut mouvoir ses jambes et ses bras mais, ici, vous êtes dans un dôjô, ce qui n'a rien à voir."
Un des exercices classiques pour les yûdansha au Honbu dôjô consiste à enchaîner six jôdan keriwaza, à savoir mawashigeri, ushiro ura mawashigeri, maegeri puis à nouveau ces trois techniques.
Chacun d'entre nous comptera un aller/retour, y compris le Sensei avec kiai systématique sur chaque coup de pied pour le tout dernier.
Au vu des airs épuisés de certains, Artur Hovannisyan Sensei reprend la parole: "Vous êtes fatigués...? Réveillez-vous! Prenez vous en mains. Vous devez réfléchir et vous demander pourquoi vous avez du mal. Moi, je vais vous le dire...Vous vous écoutez trop...Vous portez une ceinture noire donc vous avez des responsabilités. Quand vous êtes chez vous, entraînez-vous, faites des pompes et des abdominaux, allez soulever des poids et courir. Ce n'est pas ici que vous devez forger votre physique. Mais, au delà, de votre corps c'est votre mental qu'il faut travailler. Quand vous êtes épuisés c'est là qu'il faut se bousculer et en vouloir. Regardez quand Kanchô a gagné le World Tournament ou l'épreuve des cent combats et éveillez vous..."
Nous passons ensuite au travail du kata Tekki sono ni. Là encore, le Sensei s'attachera à une grande précision des mouvements et nous reprendra de nombreuses fois.
"Un kata est comme un combat. Vous devez visualiser vos adversaires sinon cela n'a aucun sens. Sans substance il n'y a pas de karatedô. Chaque technique doit être puissante, rapide et efficace. Attention aux niveaux et aux points visés."
Quelques démonstrations de bunkai possibles nous éclairerons sur les mouvements de ce kata dont tous les Instructeurs du Honbu dôjô ont reçu un tutoriel spécifiques de deux heures, tout récemment, par Matsui Shokei Kanchô lui même. Les trois Tekki étaient concernés par ce cours spécial.
Pour achever ce cours d'une centaine de minutes, tout le monde combattra contre tout le monde, à 50% de puissance. Ce qui n'empêchera pas quelques knockdowns après lesquels le Sensei enfoncera le clou: "Tu a reçu un jôdan mawashigeri? Tant pis pour toi; tu t'es mal protégé", "Tu n'as pas vu venir le ushirogeri au foie? Dorénavant fais attention et apprends à te protéger", "Joli gedan mawashigeri, ça fait mal? Monte le genou la prochaine fois".
Nous souhaitons préciser que toutes ces remarques n'ont rien de moqueuses mais qu'elles font partie de l'éveil que le Sensei évoqua à plusieurs reprises durant ce cours. Nous en voulons pour preuve la vigueur avec laquelle sera répété le dôjô kun, repris par le groupe après récitation de chaque principe par votre serviteur, en tant qu'ichiban Senpai.
Après le ménage habituel, nous resterons tous pendant une quinzaine de minutes à écouter le Sensei et chercher à comprendre le message.
Suivre de tels cours est un grande chance dont nous sommes conscient.