par karatejapon » Jeu Nov 28, 2013 3:42 pm
Nous poursuivons notre tour du monde des dôjô de karatedô avec une escale en Corée du Sud.
Le Pays du matin calme (une des versions du surnom de ce pays) est une nation réputée pour ses Arts Martiaux, principalement le taekwondo mais aussi le hapkido et le tangsoodo entre autres. Les dôjô de jûdô sont aussi relativement nombreux dans les grandes villes sud coréennes.
Reste le cas du karatedô, peu présent pour des raisons essentiellement historiques. Le Japon n'a en effet pas laissé que des bons souvenirs au peuple de la péninsule même si les jeunes générations contribuent à changer la donne.
L'Ecole la plus répandue est le Shotokan karate de la mouvance JKA.
Le Kyokushinkaikan avait tenté une implantation à Séoul dont nous vous avions parlé dans un article déjà ancien de plusieurs années maintenant. Cette opération s'était soldée par un piteux échec comme vous avez pu le lire.
Après une totale remise à plat, la situation n'est plus la même avec deux dôjô dont un dans la capitale et trois ouvertures programmées d'ici la fin de l'année prochaine.
Nous avons donc visité, la semaine dernière, le Honbu dôjô IKO de Corée du Sud.
Le Kim Kyokushinkai dôjô est situé au coeur de l'immense capitale du pays, près d'un quartier universitaire. Ceci explique l'importance des effectifs estudiantins lors des entraînements.
Le responsable se nomme Kim Do Geon et possède le grade de sandan, obtenu au Japon, pays où il se rend annuellement afin de s'entraîner sous la direction de Matsui Shokei Kanchô et divers shihan de l'organisation.
Kim Sensei s'est montré accueillant et ravi de recevoir un visiteur étranger. Seul problème, il ne parle que le coréen, langue que nous ne possédons pas. Fort heureusement, Umemoto Hideki san, ikkyû Japonais qui parle couramment coréen et anglais s'est proposé pour tenir le rôle d'interprète. Cet homme d'affaires Nippon vit depuis deux ans à Séoul et fait partie des plus anciens deshi du dôjô. Nous en profitons ici pour le remercier de sa patience et sa gentillesse à notre endroit.
Arrivé au dôjô quarante cinq minutes avant le cours pour adultes de 20:00 (un autre réservé aux enfants a lieu à 17:00), nous trouvons la porte ouverte mais...Personne dans les locaux. Nous attendons donc poliment à l'entrée non sans avoir au préalable discrètement évalué les lieux.
De prime abord, rien de très engageant. Le dôjô est enterré sous un immeuble quelconque et la forte odeur d'humidité montre bien qu'il s'agit d'une cave reconvertie pour la pratique.
Pas de fenêtre, juste un soupirail dans le bureau du Sensei. Pas de chauffage non plus. Celles ou ceux d'entre vous qui ont connu les hivers très rigoureux de Séoul comprendront l'inconfort qui en résulte. Lors de notre visite, la température extérieure n'était que de deux degrés avec le vent du nord habituel qui balaye la péninsule coréenne. L'entraînement en été ne doit pas être non plus particulièrement agréable mais, à tout le moins, deux grands ventilateurs sont fixés au plafond.
Les murs suintent et l'ensemble reste spartiate pour le moins. Le tout petit vestiaire, bas de plafond et partagé par les deux sexes confirme tout cela. Mais, quelque part, peu importe car les pratiquants sont là pour s'entraîner et s'endurcir.
Les murs sont agrémentés de photos diverses, articles de presse et posters, le tout en relation avec le Kyokushinkai karate.
Le Sensei arrivera quinze minutes avant le début du cours. Il était parti faire ses courses. Selon lui, pas la peine de fermer à clé car nous sommes en Corée et, de toute façon, il n'y a rien à voler dans un dôjô...
Aucun yûdansha présent lors de ce cours mais des deshi portant des ceintures de la blanche à la marron. Des femmes, des hommes mais aussi quelques enfants car ceux qui le souhaitent peuvent participer aux entraînements des adultes. Le fils de Kim Do Geon Sensei fait partie des jeunes adolescents ce soir là. Selon son père, "il faut le sortir des jeux vidéos, comme tous les petits Sud Coréens!"
Les participants arrivent au fur et à mesure bien que le cours débute précisément à 20:00. Tous sont acceptés sans problème car les temps de transit sont longs dans cette ville et les employés des grandes sociétés finissent généralement tard. Il en va de même pour les étudiants qui restent après les cours pour des recherches ou des leçons particulières.
L'ambiance est bon enfant, sérieuse et appliquée. Le Sensei reprend quand il le faut les élèves sur des points techniques.
Le cours en lui même est totalement à l'image de ce qui se fait au Honbu dôjô, à Tôkyô. Aucune surprise pour nous. Echauffement/étirements, idogeiko, kihon puis kata. Une particularité tout de même pour ce dernier exercice car Kim Do Geon Sensei fait exécuter le taikyoku sono ichi avec des techniques de son choix et que les élèves doivent connaître par coeur. Basiquement il s'agit de blocages avec le genou à chaque rotation puis deux contre attaques de poing. Le tout dernier mouvement du kata doit être une technique de jambe assortie d'un kiai. La fois suivante, les blocages sont effectués avec un bras et le dernier mouvement est une technique de poing, toujours avec le kiai.
Le large usage des pattes d'ours est systématique avec des séquences de quatre vingt dix secondes sur la longueur du dôjô.
Par exemple, gedan mawashi geri gauche et droite sur le partenaire qui recule puis la même chose quand ce dernier avance. Idem avec les tsuki, hizageri, ushirogeri, etc.
Kim Do Geon Sensei nous explique attacher une importance primordiale à ce type d'exercice. Selon son idée, cela aide à gagner en précision et fluidité. Le jeu de jambes s'en trouve également amélioré.
Les vingt dernières minutes de l'entraînement sont consacrées au combat avec gants légers et protège tibias.
Deux lignes se font face et c'est parti pour deux minutes à chaque tour.
L'exercice ayant été qualifié de "sparring" par le Sensei, sans autre précision quant à l'intensité demandée, nous entamons les débats tranquillement et laissons travailler les jeunes et les femmes.
Par contre, dès le troisième tour, nous observons que les hommes ne se font aucun cadeau et nous notons plusieurs knockdowns.
Le nikkyû qui nous fait face, grand comme beaucoup de jeunes Sud Coréens, semble vouloir en découdre pour l'avant dernier tour. Souhaitant rester un invité poli et mesuré, qui plus est d'un grade supérieur au sien, nous essayons de calmer quelques peu les ardeurs de notre partenaire mais sans résultat probant. Quelques low kicks plus tard, notre ami se relève, remercie chaleureusement et se replace en boîtant bas.
Le dernier tour, annoncé par le Sensei comme étant cette fois ci un "véritable kumite", voit un deshi porteur d'une ceinture verte se placer face à nous. Kim Do Geon Sensei explique qu'il s'agit du meilleur combattant du dôjô, champion national en catégorie open. Le pays ne compte qu'une centaine de pratiquants donc ce titre, aussi honorable soit-il, n'est peut être pas vraiment significatif mais méfiance tout de même. Selon son Sensei il sera bon pour lui d'affronter un yûdansha. Dont acte.
Jouer la carte de la méfiance était le bon choix car nous nous retrouvons face à une pile électrique de soixante dix kilos qui cherche ni plus ni moins le KO. Le bougre n'a pas l'air d'avoir peur et attaque allègrement sous tous les angles, sans faire vraiment attention aux coups de poing au visage. Qui n'a pas, dans le feu de l'action, touché son partenaire au visage? Mais, là, les "écarts" se multiplient sans que le Sensei n'interviennent. Pire, les autres élèves se sont arrêtés pour regarder et encouragent leur compatriote. J'ai maintenant un adversaire et non plus un partenaire en face de moi. Mon gabarit bien supérieur au sien, ma modeste expérience et quelques qualités physiques me permettent de tenir tête au jeune champion mais tout juste. A l'annonce des trente dernières secondes il accélère et cherche plus que jamais le coup dur. Tout à sa dynamique offensive il néglige de serrer la garde et je le freine avec un hizageri à l'abdomen. Un deuxième, au même endroit rétablira l'équilibre et un dernier, en pleine poitrine, le couchera définitivement. Mais que ce fut dur!
Nous n'avons toujours pas compris de façon certaine s'il s'agissait d'un test (pour lequel d'entre nous d'ailleurs...?), comme nous l'expliqua ensuite Umemoto Hideki san mais, en tout cas les débats furent d'un niveau relevé pour le moins. Quoiqu'il en soit, ce jeune pratiquant nous remercia pour la leçon et sembla sincèrement ravi.
Après les traditionnelles photos et des promesses de se revoir dès que possible, Kim Do Geon Sensei nous remercia longuement pour cette visite et refusa catégoriquement tout paiement pour ce cours.
La soirée s'acheva dans un restaurant japonais pour un copieux souper avec beaucoup d'alcool, de rires et bonne humeur.
Nous tenons à remercier sincèrement le Sensei et tous ses deshi pour la qualité de leur accueil.
Kim Kyokushinkai dôjô
B1 360 Sangdo ro
Dongjak gu
Seoul 156-836
Téléphone du dôjô: 82-2-325-9879
Téléphone portable du Sensei: 82-10-3729-2329
Station de métro Sangdo, ligne 7. Sortie numéro 2. Prendre derrière soi, sur le même trottoir, à cinquante mètres. L'entrée du dôjô se trouve dans un renfoncement, au bas de deux volées de marches.
Cours tous les soirs du lundi au vendredi inclus, de 20:00 à 21:30. Possibilité de rester s'entraîner seul ou à plusieurs jusqu'à 22:00. Sacs de frappe lourds et légers, banc de musculation et divers matériels à disposition des pratiquants.