par karatejapon » Lun Fév 28, 2011 6:11 pm
La récente Coupe de France Kyokushinkai ainsi qu'une discussion suivie ces derniers jours sur Facebook nous ont inspiré l'article qui suit. A vous d'y réagir si vous le souhaitez.
Ayant officié en tant que juge (confirmé) et arbitre (stagiaire), voici deux semaines, lors du tournoi hexagonal de niveau le plus élevé, nous avons pu observer certains comportements qui nous ont fait réagir et, surtout, réfléchir. Dans le mesure où nous avons déjà combattu au Japon mais aussi assisté à plusieurs compétitions, régionales, nationales et mondiales, un parallèle avec ce que nous avons pu observer au stade Pierre de Coubertin s'impose selon nous.
Nous ne parlons pas ici du niveau des combattants sur le tatami mais bien de l'attitude d'une partie du public. Ce qui nous permet de revenir au coeur du sujet du site, à savoir comment le karatedô est vécu au Japon.
Pas particulièrement affligé d'oreilles chastes, force est néanmoins de reconnaître que ce que nous avons entendu dans les gradins lors de certains combats est, pour nous, tout simplement inadmissible.
Nous ne reprendrons pas ici les termes vulgaires et orduriers relevés, c'est inutile. Pour choquants qu'ils soient, nous avons été encore plus désolés de voir que ces diatribes venaient parfois de la bouche même de combattants, encourageant leurs camarades de dôjô. Encore plus grave à notre avis.
Soyons clair, il est tout à fait normal et légitime d'encourager les siens. Votre webmestre le premier a su apprécier le support vocal prodigué lors de l'Open du Kansai, l'année dernière.
Cela étant dit, nous avons (avions?) la faiblesse de croire que match de football et tournoi de karate évoluaient dans des sphères totalement différentes. Désolé pour les fans de ballon rond mais force est de reconnaître que la finesse et la bienséance sont souvent absentes des tribunes.
Il est certes prévu dans le règlement établi par les instances françaises de la Kyokushinkai que des sanctions sévères peuvent être appliquées en cas d'excès, comme ceux que nous avons vécu lors de cette journée. Peut être injuste pour le combattant qui se verrait pénalisé au regard de l'attitude des ses supporters mais s'il faut en passer par là, soit.
Il ne s'agit en aucun cas, pour nous, de chercher à dédouaner le corps arbitral. Des erreurs ont été commises, par votre webmestre notamment. Nous les reconnaissons de bonne grâce. Elles sont malheureusement inévitables; aux arbitres et juges de tendre vers l'excellence et travailler afin de s'améliorer.
Nous ne cherchons pas à jeter l'opprobre sur tel ou tel dôjô en particulier mais nous avons malgré tout identifié certaines personnes très virulentes qui ont fait assaut de bêtise et de grossièreté à l'encontre du corps arbitral. Ces brillants sujets, non contents d'être mal éduqués (chez eux? Au dôjô? Les deux...?) se sont montrés aussi peu courageux. Leurs vociférations ont vite cessé quand nous leur avons intimé d'arrêter sans délai leurs débordements inopportuns.
Cette situation est impensable au Japon. Les encouragements fusent, bien entendus car on peut être partisan tout en sachant raison garder.
Nouvel accroc à ce niveau puisque les mêmes (supposés) pratiquants se sont fait une joie d'encourager leurs combattants dans des termes à nouveau inadmissible. Aucun respect pour celles et ceux qui ont le courage de monter sur le tatami. On en est carrément arrivé à l'injure stupide et raciste (vous voudrez bien nous pardonner le pléonasme) à l'encontre de combattants affrontant leurs camarades de dôjô .
Pascal Germain Sensei, responsable de l'arbitrage, s'est approché du groupe responsable de ces avanies et a rapidement calmé tout ce petit monde. C'est très bien mais cela ne devrait pas se produire.
Pour notre part, jamais au grand jamais, nous n'avons vu de tels comportements au Japon.
Des encouragements bruyants, certes, voire quelques sifflets mais pas d'écarts de conduite de cet ordre.
Alors, de quoi s'agit-il? D'un manque d'éducation que les instructeurs se doivent de dispenser au sein des dôjô? Possible car, au Japon, le mot "respect" est souvent repris mais jamais galvaudé, selon notre compréhension du moins.
Certains pourront objecter à nos propos et idées qu'il s'agit de personnes jeunes, manquant encore de repères et que tout cela n'est pas bien grave. Nous agréons à l'idée voulant qu'il faut que jeunesse se passe. Mais, justement, c'est quand on est jeune pratiquant qu'il faut être mis sur le bon chemin; la bonne "Voie" en d'autres termes.
Alors, quitte à passer pour pour un affreux passéiste, "tatamisé" et se voulant plus Japonais que les Japonais eux mêmes, nous avons choisi notre vision du karatedô.
Comme nous l'avons écrit plus haut, les compétitions au Japon sont l'occasion de belles démonstrations d'encouragements. Que celles et ceux qui n'ont jamais mis les pieds dans l'archipel n'aillent surtout pas imaginer des ambiances aseptisées dignes de tournois d'échecs. Rien ne serait plus faux. Néanmoins, le comportement, tant des spectateurs que des combattants, reste courtois et dépourvu du langage de charretier relevé lors de la Coupe de France.
Evidemment, connaissant plutôt bien le Japon et notamment la vie sur place, nous comprenons bien que la culture du pays et ses codes sociaux font que les attitudes nippones sont plus mesurées qu'en occident. Il ne s'agit pas pour nous de tenter une forme de moralisation. Ce n'est pas notre rôle et nous avons d'autres choses à faire. Par contre cette tâche d'éducation incombe aux enseignants et les Japonais s'en acquittent fort bien avec sérieux et conscience des enjeux.
Nous n'accablerons pas le responsable du dôjô - que nous ne nommons d'ailleurs pas - dont les membres ont montré un comportement outré, loin des valeurs prônées à travers le "dô", si cette idée évoque quoi que ce soit chez certains d'entre eux. Espérons que ce suffixe ne soit pas, lui non plus définitivement galvaudé.
Sans placer le karatedô au Japon sur un piédestal ou l'idéaliser, il est au moins clair dans notre esprit que bien des leçons doivent encore être apprises.