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Propos d'un débutant Japonais

Description de la pratique réelle du karate au Japon.

Propos d'un débutant Japonais

Message par karatejapon » Mer Juin 10, 2009 11:42 am

Après vous avoir proposé des interviews de pratiquants chevronnés, tenants de diverses ryû, nous souhaitons relayer aujourd'hui les propos et avis d'un débutant Japonais.
Commencer n'est pas toujours facile et les questions sont nombreuses sur la façon de s'y prendre. Que faire? Que ne pas faire? Etc.

Satô Yoshihiko, 39 ans, cuisinier dans un restaurant de Shinjuku, au coeur de Tôkyô, a franchi le pas et s'est inscrit au Honbu dôjô Kyokushinkaikan. Au delà de l'Ecole, son expérience pourra servir aux pratiquants d'autres ryû.

Voici les principaux points de nos échanges dans un restaurant d'Ikebukuro, à proximité du dôjô.


- kj: "Pourquoi avoir commencé le karate?"

- S. Y.: "J'y pensais depuis longtemps mais je n'osais pas vraiment. Et puis à cause du travail je n'avais pas le temps. Maintenant je travaille à Shinjuku donc pas loin d'ici par le train.
Je suis venu regarder comment c'était après avoir acheté un magazine pour l'adresse et je me suis inscrit l'année dernière.
Je ne suis pas du tout sportif; je n'ai rien fait depuis le lycée. Je voulais faire du sport, être plus musclé et plus fort parce que je suis petit et léger. Donc le karate c'est très bon pour moi.
Aussi j'avais une image de sérieux."


- kj: "Pas de regrets?"

- S. Y.: "Non, non, je suis content. C'est dur, je suis très fatigué après l'entraînement mais ça va."


- kj: "Pourquoi ce dôjô?"

- S. Y.: "J'avais entendu parler d'Oyama Sôsai et j'avais lu quelques numéros de World karate. Je connaissais aussi des bandes dessinées sur le karate.
Surtout c'est assez pratique pour moi par rapport à mon travail. Je peux venir le matin ou le soir selon les semaines. Sinon je manquerais trop de leçons."


- kj: "Comment se sont passés les débuts? Difficiles ou simples?"

- S. Y.: "...J'étais un peu inquiet car j'avais vu un cours de ceintures noires et c'était...dur. J'ai vu des KO alors j'étais un peu inquiet, oui...Et puis je ne savais comment faire le premier cours. Je savais qu'il fallait copier sur les senpai alors j'ai bien regardé. Comme c'était un cours de débutants ça s'est bien passé mais quand même très fatigant.
Je suis venu en avance pour payer et je me suis présenté au Sensei. Je n'avais pas de parrain alors j'ai fait simplement, un peu comme au travail.
Heureusement, dans les vestiaires, un Senpai yûdansha m'a aidé pour mettre la ceinture correctement, etc."


- kj: "Et donc...?"

- S. Y.: "Au début je ne connaissais rien et je ne comprenais pas le nom des techniques. J'ai copié sur les personnes de la ligne devant la mienne parce que j'étais le dernier au fond. Bien sûr je regardais le sensei mais ce n'est pas facile de refaire les mêmes choses. Il est venu plusieurs fois me corriger et donner des explications. J'ai fait du mieux que je pouvais."


- kj: "Quelles étaient donc vos impressions après ce premier cours?"

- S. Y.: "J'étais plutôt content mais complètement perdu. J'ai essayé de refaire des mouvements chez moi, devant le miroir mais ce n'était pas terrible. Je ne me souvenais plus du nom des techniques alors j'ai cherché sur Internet.
Et puis j'avais mal partout!"


- kj: "Vous avez eu envie de poursuivre?"

- S. Y.: "Oui, oui. J'étais content d'y retourner deux jours plus tard sauf pour les douleurs musculaires. Au bout de quelques mois ça allait mieux, petit à petit je me suis senti beaucoup mieux, oui...
Maintenant je m'entraîne deux ou trois fois par semaine; ça dépend du travail."


- kj: "Quels sont vos éventuels objectifs?"

- S. Y.: "Je me présente à l'examen pour passer un kyû dans quelques semaines. Je révise les kata et les techniques tous les jours. Je regarde aussi beaucoup les autres, mes senpai surtout.
Pour le kumite je ne sais pas trop...mais les anciens font attention aux débutants donc ça va. Je mets souvent un casque pendant le cours mais je n'y ai pas droit pour l'examen."


- kj: "Vous suivez les cours de plusieurs enseignants?"

- S. Y.: "Je vais aux entraînements pour les débutants mais ça dépend des jours à cause de mon travail. Je connais trois Sensei maintenant mais ce n'est pas vraiment important pour moi car je dois apprendre beaucoup de choses. Plus tard, peut être, j'irai à des cours pour les deshi plus anciens. Pour le moment ça ne change pas grand chose mais comme le Sensei principal sait que je dois passer l'examen, il regarde bien ce que je fais. Donc j'essaye d'aller surtout à ses cours. A la fin de l'entraînement il me donne quelques conseils et corrige les principaux défauts."


- kj: "Vous vous sentiez prêt et vous vous êtes inscrit?"

- S. Y.: "...En fait un des Sensei a parlé de l'examen et a dit qu'il fallait s'inscrire à l'accueil. Mais ce n'est pas vraiment moi qui décide, bien sûr. De toute façon je suis le programme comme tout le monde. J'avais l'ancienneté requise alors je dois passer l'examen.
Bon...j'espère que ça ira mais je dois beaucoup m'entraîner. Je révise pendant mon temps libre et j'arrive en avance au cours pour pratiquer tout seul. Sinon je demande à mes senpai de corriger les erreurs et me montrer des techniques. J'ai aussi acheté des DVD pour travailler à la maison."


- kj: "Que conseilleriez-vous aux débutants?"

- S. Y.: "Ca...je ne sais pas trop car je ne suis pas assez ancien. Bon...surtout regarder les élèves plus avancés parce que sinon on ne progresse pas. Essayer aussi de venir à beaucoup de cours. De toute façon on ne peut pas progresser ou se présenter à un kyû si on ne vient pas assez souvent."


- kj: "Vous voulez dire que l'autorisation de se présenter à un examen dépend aussi de la présence régulière aux cours?"

- S. Y.: "Oui, oui, c'est ça. Vous savez qu'il faut s'inscrire à l'accueil à chaque fois sur la feuille de présence. Si vous n'êtes pas venu suffisamment vous n'avez pas le droit de vous présenter à l'examen."


- kj: "Etes-vous venu voir un passage de grade?"

- S. Y.: "Oui. Le Sensei nous a conseillé de venir observer pour savoir comment ça se passe. C'est important car sinon on est perdu le jour de l'examen."


- kj: "Après quasiment une année de pratique, quel est votre vision du karate?"

- S. Y.: "...Je suis content, ça m'intéresse mais j'ai encore beaucoup à apprendre. En tout cas le karate c'est très sérieux et j'apprécie.
Je crois que c'est bien pour les jeunes parce que le Japon a beaucoup changé, surtout à Tôkyô. J'ai vu la différence par rapport à l'époque de mon adolescence. Ceux qui viennent ici sont sérieux, polis, respectueux et s'entraînent bien. C'est bon pour le corps mais aussi pour la vie de tous les jours. J'aime bien les rapports polis et la culture traditionnelle japonaise. Je retrouve tout ça au dôjô. C'est un peu comme quand je parle avec des clients habitués du restaurant où je travaille. Les rapports sont bons et marqués de courtoisie. Tout le monde sait ce qu'il doit faire et connaît sa place. C'est important pour les Japonais comme moi qui suivent les traditions.
Je ne sais pas mais...Peut être que ça équilibre avec les excès en dehors du dôjô. Aussi j'aime bien le fait que tout le monde travaille ensemble ici. Bien sûr on regarde les senpai mais tout le monde essaye de s'entraider pendant les cours. Quand on fait des exercices difficiles comme frapper au sac, ceux qui ont fini encouragent les autres. Je crois que c'est très bon et je ne vois pas ça en dehors du dôjô de karate. Ca me rappelle un peu le baseball au lycée mais en plus sérieux."


- kj: "Voyez vous le karate comme une technique d'autodéfense?"

- S. Y.: "Oui mais...Je dois apprendre beaucoup parce que je n'ai pas encore les mouvements rapides et naturels des anciens. Et puis physiquement ils sont durs. Même quand ils reçoivent des coups violents ils continuent à combattre. Ils ne sont jamais découragés. Je ne peux pas faire ce qu'ils font sur le plan physique. Et je crois aussi que sur le plan psychologique ils sont très forts. Donc, si ils doivent se défendre c'est naturel ou instinctif pour eux. Je vois plusieurs yûdansha qui sont vraiment forts au dôjô même des gens de plus de quarante ans. Ils peuvent se servir facilement du karate pour se défendre; ils connaissent des techniques très fortes et dangereuses. Pour le moment j'apprends."


- kj: "Connaissez vous l'historique de votre Ecole?"

- S. Y.: "Oui, un peu. Les Sensei en parlent parfois au cours et j'ai lu plusieurs articles dans les magazines."


- kj: "Avec le recul, choisiriez-vous une autre Ecole?"

- S. Y.: "Maintenant je suis content ici et je ne voudrais pas changer. Mais au début j'aurais très bien pu rejoindre une autre Ecole si le dôjô était près de chez moi ou du travail. Il n'y en a pas dans le quartier de Saitama ken où j'habite.
En fait j'ai vu un autre dôjô à Shinjuku, JKA dôjô, mais je ne vais pas changer maintenant, c'est trop tard. Quand on débute, on peut aller n'importe où je crois mais ensuite s'il faut tout recommencer c'est trop difficile, surtout à mon âge."


Nos remerciements vont à Monsieur Satô Yoshihiko pour le temps qu'il a bien voulu consacrer à cette conversation.
Nous lui souhaitons tout le succès possible pour le passage de grade à venir.

Espérant vous avoir intéressés, comme de coutume, nous restons seul responsable des éventuelles erreurs de traduction et d'interprétation du japonais au français.
Dernière édition par karatejapon le Mer Juin 10, 2009 5:33 pm, édité 3 fois.
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Message par cardinal » Mer Juin 10, 2009 2:45 pm

Tu nous a interessés comme d'habitude avec cette excellente interview !

C'est très instructif de voir la vision d'un débutant Japonais, vision assez proche d'un débutant "européen", sauf peut être pour ce besoin, très prononcé de ce Japonais, de replonger dans les traditions de son pays.

Merci webmestre.
Pourquoi faire du Karaté ?
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~Mas Oyama~
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Message par Karuna » Mer Juin 10, 2009 8:52 pm

Merci pour cet interview de débutant ... c'est très ..."japonais"!
NAMASTE
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Message par liptonic » Sam Juin 13, 2009 10:19 am

Ah super article , les questions étaient variées et intéressantes . Bravo .

Par contre, il y a quelque chose que je n'ai pas compris :

Donc le karate c'est très bon pour moi.
Aussi j'avais une image de sérieux."

+
En tout cas le karate c'est très sérieux et j'apprécie

+
Ca me rappelle un peu le baseball au lycée mais en plus sérieux



Le Karate a-t-il une image aussi sérieuse que ca au Japon ?

Sinon , au Kyokushinkai il n'y a que des cuisiniers ? Car il me semble que ce n'est pas le premier interviewé :wink:
liptonic
 
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Message par Mustafa Jean-Andre » Sam Juin 13, 2009 3:37 pm

Ou le Webmaster écume tous les restaurants
TOUT EST POSSIBLE A CELUI QUI CROIT!
Site: http://kyokushin-seinan.kazeo.com/
Site: http://s-d-a.kazeo.com/
Mustafa Jean-Andre
 
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En dôgi en cuisine

Message par karatejapon » Sam Juin 13, 2009 4:19 pm

Effectivement, le karatedô possède une image de sérieux au Japon, comme les budô en général. Visiblement encore plus pour ce monsieur.

L'organisation ne compte pas que des cuisiniers mais il est vrai que nous en connaissons au moins deux, bientôt rejoints par un de nos membres Français, lui aussi derrière les fourneaux.
Et depuis le temps que nous allons au Japon, nous connaissons de nombreux restaurants.
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Message par George-Alain Jones » Lun Juin 15, 2009 9:18 am

Moi j'ai une petite question également, le webmestre serait-il une réincarnation du roi soleil, car il a une forte tendance à employer la première personne du pluriel pour parler de lui.

:lol: :lol: :lol:

P.S: Ceci est juste une pointe d'humour, ok, je sors!
George-Alain Jones
 
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Il vous en prie

Message par karatejapon » Lun Juin 15, 2009 11:16 am

Effet de style, tout simplement. Par ailleurs le Roi Soleil et autres grands personnages (Alain Delon par exemple, selon les Guignols de l'info... ) utilisent plutôt la troisième personne du singulier.
Pas d'enflure de l'ego pour votre webmestre donc. Il vous en prie...Et vous noterez d'ailleurs que de nombreux articles relatant une expérience personnelle sont rédigés à la première personne du singulier.
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Message par George-Alain Jones » Lun Juin 15, 2009 11:28 am

Sens de l'humour et de l'auto-dérision grandement apprécié de notre côté... Enfin je veux dire de mon côté.
George-Alain Jones
 
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Message par Mustafa Jean-Andre » Lun Juin 15, 2009 3:42 pm

Moi même nous nous joignons a vos propos George, Alain et Jones :lol:
TOUT EST POSSIBLE A CELUI QUI CROIT!
Site: http://kyokushin-seinan.kazeo.com/
Site: http://s-d-a.kazeo.com/
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Image plutôt positive

Message par karatejapon » Lun Juin 15, 2009 4:02 pm

Un peu de sérieux dans les rangs!

Pour en revenir à cet article, au Japon, les non pratiquants considèrent généralement les pratiquants de budô comme des gens sérieux et responsables. Malheureusement, certaines affaires nauséabondes (d'argent principalement) mettent parfois à mal cette bonne réputation. Rien de surprenant donc au qualificatif employé à plusieurs reprises par notre cuisinier.
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Re: Image plutôt positive

Message par cardinal » Lun Juin 15, 2009 6:28 pm

karatejapon a écrit :Pour en revenir à cet article, au Japon, les non pratiquants considèrent généralement les pratiquants de budô comme des gens sérieux et responsables. Malheureusement, certaines affaires nauséabondes (d'argent principalement) mettent parfois à mal cette bonne réputation.
Rien de surprenant donc au qualificatif employé à plusieurs reprises par notre cuisinier.


C'est loin d'être le cas chez nous en tout cas de par chez moi, méconnaissance de la culture "Budo" peut-être...
Pourquoi faire du Karaté ?
"La mission ultime du karaté est de développer les meilleurs traits du caractère humain plutôt que former les êtres humains à affronter ses ennemis physiques"

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